Nos clients qui sont déjà propriétaires (ou qui envisagent l’acquisition) d’une ou de plusieurs sociétés en exploitation posent souvent cette question aux fiscalistes de MNP. La réponse va dépendre de votre situation et de vos préférences.
Dans cet article, nous résumons certains des avantages et des inconvénients d’une société de portefeuille pour vous aider à savoir si cette structure est idéale pour répondre à vos besoins.
Quels sont les avantages d’une société de portefeuille?
Une société de portefeuille exploitée conjointement avec une société en exploitation peut comporter de nombreux avantages. Elle peut notamment permettre de réaliser des économies d’impôts, d’apporter une protection additionnelle contre les créanciers et de rendre une entreprise plus attrayante aux yeux d’acquéreurs potentiels.
Les désavantages, quant à eux, se limitent essentiellement aux coûts comptables et aux frais juridiques associés à cette structure et à la complexité de sa mise en place et de son maintien.
Comment savoir si j’ai besoin d’une société de portefeuille?
Avant de faire l’ajout d’une société de portefeuille à une structure d’entreprise existante, il faut peser le pour et le contre (coûts additionnels et complexité). Comme elle peut s’avérer fort intéressante ou ne procurer que des bénéfices minimes, il importe d’entrée de jeu de bien saisir comment elle peut répondre à vos besoins et contribuer à l’atteinte de vos objectifs.
Report d’impôt et fractionnement du revenu
Un des principaux avantages que confère une société de portefeuille est la possibilité d’avoir recours au report d’impôt et au fractionnement du revenu dans les cas où il est impossible de mettre en œuvre ces stratégies fiscales dans une société en exploitation (p. ex., si celle-ci compte de nombreux actionnaires sans lien de dépendance).
Le taux d’imposition appliqué aux bénéfices générés par une société en exploitation est faible. Ces revenus peuvent être distribués aux actionnaires sous forme de dividendes. Ils sont alors immédiatement assujettis à l’impôt sur le revenu des particuliers, mais à un taux préférentiel (qui tient compte de l’impôt des sociétés déjà prélevé).
Or, si ces dividendes sont plutôt versés à une société de portefeuille qui répond à certains critères (les actions de la société en exploitation qu’elle détient représentent plus de 10 % de la valeur du capital et des droits de vote), ils peuvent circuler en franchise d’impôt entre les deux sociétés.
Autrement dit, aucun impôt des particuliers ne sera prélevé sur le versement. Dans la plupart des cas, le résultat sera une augmentation de 30 % à 45 % des capitaux pouvant être réinvestis et un report d’impôt jusqu’à ce que l’actionnaire ait besoin de ces sommes, possiblement aussi tard qu’à la retraite.
Ce dernier peut décider du moment auquel la société de portefeuille lui verse des dividendes. Ainsi, il peut les toucher graduellement pour tirer parti d’un report d’impôt et possiblement réaliser des économies si lui-même ou des actionnaires ou membres de sa famille sont dans une fourchette d’imposition moins élevée au moment du versement[1].
De plus, une société de portefeuille peut réaliser les mêmes investissements qu’un particulier. L’actionnaire n’est donc pas limité dans ses stratégies de placement. On peut y détenir des immeubles, des valeurs mobilières, des actions de sociétés à capital fermé, des polices d’assurance vie, etc. Dans la plupart des cas, les revenus de placement gagnés annuellement seront assujettis à des taux d’imposition comparables à ceux de l’impôt des particuliers. Il n’y a donc rien pour dissuader un actionnaire de procéder ainsi. Toutefois, un groupe de sociétés qui génère un revenu passif annuel supérieur à 50 000 $ peut avoir de la difficulté à profiter de la déduction accordée aux petites entreprises.
Une société de portefeuille présente donc des avantages dans le cas où plusieurs actionnaires sont propriétaires d’une ou de plusieurs sociétés en exploitation. Grâce aux participations qu’il détient par l’intermédiaire d’une société de portefeuille, chacun des actionnaires peut faire le choix de se faire verser des dividendes par celle-ci. Il peut également décider de les laisser en partie ou en totalité dans la société de portefeuille pour les réinvestir et reporter ainsi l’impôt des particuliers à payer.
Dans un tel scénario, une société de portefeuille permet à chaque actionnaire d’une société en exploitation de choisir la stratégie de prélèvement et de réinvestissement qui lui convient. Les membres de la famille d’un actionnaire peuvent également profiter des bénéfices de la société en exploitation, par exemple en possédant des actions sans droit de vote de la société de portefeuille. De cette façon, il n’y a d’incidence ni sur les activités de la société en exploitation, ni sur son contrôle, ni sur ses autres actionnaires.
Protection contre les créanciers
Même si les actions de la société en exploitation sont détenues par un seul actionnaire ou une seule famille, il peut être avantageux de constituer une société de portefeuille pour y amasser et y réinvestir les bénéfices excédentaires de la société en exploitation.
Le versement de dividendes intersociétés libres d’impôt met ces bénéfices à l’abri d’éventuels créanciers et de toute réclamation de responsabilité contre la société en exploitation.
Le versement de dividendes intersociétés libres d’impôt met ces bénéfices à l’abri d’éventuels créanciers et de toute réclamation de responsabilité contre la société en exploitation.
Services de fiscalité
Profiter de l’exonération cumulative des gains en capital
En détenant dans une société de portefeuille les liquidités excédentaires et les placements d’une société en exploitation, on fait en sorte qu’au moins 90 % des éléments d’actifs de cette dernière soient utilisés dans le cadre de ses activités. Elle est ainsi purifiée et ses actions pourraient être admissibles à l’exonération cumulative des gains en capital, qui s’élève à 1 016 836 $ pour 2024.
Seuls les particuliers ont droit à cette exonération. Il est donc essentiel de bien structurer l’actionnariat de la société en exploitation afin que l’on puisse régulièrement la purifier en profitant d’un report d’impôt et que chacun de ses actionnaires puisse profiter de l’exonération au moment de vendre ses actions. Dans bon nombre de cas, intégrer une fiducie familiale à la structure d’entreprise peut faciliter ces opérations.
Rendre l’entreprise plus attrayante aux yeux d’acquéreurs potentiels
Nous avons déjà abordé les avantages de détenir les liquidités excédentaires et les placements d’une société en exploitation ailleurs que dans celle-ci. Bien souvent, il peut également être judicieux de détenir les actifs immobiliers dans une société de portefeuille distincte.
En plus d’isoler ces actifs des activités de la société en exploitation et donc de les protéger contre d’éventuels créanciers, cette séparation peut rendre les actions de la société plus intéressantes aux yeux d’acquéreurs potentiels qui souhaitent uniquement acquérir les actifs essentiels aux activités et qui sont disposés à louer les lieux où elles sont exercées. Cette division réduit également le capital nécessaire pour faire l’acquisition de la société, ce qui est loin d’être négligeable si les acquéreurs potentiels sont des membres du personnel clé ou des membres de la famille dont la capacité d’emprunt est limitée. Souvent, un acquéreur achètera les actions de la société en exploitation et louera les lieux où elle exerce ses activités, avec l’option d’en faire l’acquisition une fois que sa situation financière se sera améliorée.
S’il souhaite se porter acquéreur de la société et de ses actifs immobiliers, cette opération prend souvent la forme d’un achat des actions de la société en exploitation et d’une acquisition des actifs immobiliers.
La purification d’une société en exploitation juste avant la vente de ses actions est possible, mais elle sera vraisemblablement assujettie, en partie ou en totalité, à l’impôt en raison des règles fiscales complexes applicables à de telles opérations.
Planification d’acquisitions et de dessaisissements
Les sociétés de portefeuille jouent également un rôle important dans les opérations d’acquisition et de dessaisissement. Elles servent souvent d’instrument pour l’achat d’actions d’une société en exploitation, après quoi on procède à une fusion de la société cible afin que les intérêts du prêt souscrit pour financer l’acquisition soient dorénavant portés en diminution des bénéfices d’exploitation.
Lorsque des membres du personnel clé achètent une portion des actions d’une société en exploitation, ils peuvent utiliser les bénéfices et les dividendes engrangés dans une société de portefeuille, qui ainsi n’auront pas été assujettis à l’impôt sur le revenu des particuliers, pour rembourser le prêt souscrit pour l’acquisition. La structuration de ce type d’opération peut être délicate, car les charges d’intérêts doivent être portées en diminution des revenus imposables plutôt qu’en diminution des dividendes intersociétés libres d’impôt, ce qui pourrait annuler l’avantage fiscal immédiat que l’on cherche à obtenir.
Une société de portefeuille peut aussi être utilisée pour reporter l’impôt exigible à la vente d’actions d’une société en exploitation en se servant des surplus déjà assujettis à l’impôt des sociétés qu’on y a versé ou en y transférant tout actif excédentaire avant la transaction. Ces opérations peuvent être réalisées si l’on ne peut pas tirer parti de l’exonération cumulative des gains en capital ou en plus de celle-ci.
Et maintenant?
Une société de portefeuille est une structure complexe qui comporte d’importants avantages et peu d’inconvénients, mais qui nécessite une planification minutieuse pour pouvoir la mettre en place et l’utiliser efficacement.
Pour savoir si la constitution d’une telle société pourrait vous être avantageuse, communiquez avec un fiscaliste de MNP dans votre région.
[1] Cette stratégie est assujettie aux règles régissant l’impôt sur le fractionnement du revenu.