Le programme de la recherche scientifique et du développement expérimental (RS et DE) offre des encouragements fiscaux aux sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) afin de les inciter à entreprendre des activités favorisant l’avancement des connaissances scientifiques ou technologiques. Les sociétés médicales professionnelles (SMP) constituent des SPCC et, à ce titre, ont droit à un crédit d’impôt à l’investissement (CII) pouvant aller jusqu’au deux tiers des dépenses de main-d’œuvre admissibles.
L’Agence du revenu du Canada (ARC) reconnaît que la recherche médicale satisfait généralement aux critères d’admissibilité techniques du programme de RS et DE. Cependant, il peut être difficile de déterminer si une SMP peut déduire les dépenses connexes en raison de la complexité et de la nature collaborative de la pratique médicale et des activités connexes. La recherche médicale est un domaine axé sur la collaboration, où les médecins ont des relations formelles et informelles avec d’autres médecins, le secteur pharmaceutique, des entités de soins de santé, des hôpitaux et des universités.
Mise en contexte
De nombreux médecins gèrent leur pratique par l’intermédiaire d’une SMP. La SMP leur verse un salaire à titre d’employés pour des activités pouvant inclure la prestation de soins de santé, la recherche, l’administration et l’enseignement. On s’attend souvent à ce que les médecins enseignants participent à des travaux de recherche dans le cadre d’un contrat avec une entité de soin de santé affiliée. Cependant, ils ne sont généralement pas considérés comme des employés de ces entités. Ils signent plutôt des contrats qui leur confèrent le privilège d’utiliser les infrastructures de l’entité et d’accéder aux patients pour les traiter. Les produits d’une SMP découlent habituellement des tâches cliniques du médecin et non de ses autres activités comme la recherche, l’administration et l’enseignement. Le médecin n’est pas considéré comme un employé des entités affiliées et, la plupart du temps, il n’est pas rémunéré pour d’autres tâches que la prestation de soins de santé. Par conséquent, un mécanisme permet d’utiliser les encouragements fiscaux pour la recherche universitaire par lequel un médecin, à titre d’employé de sa SMP, reçoit un salaire pour ses travaux dont une partie peut être appliquée au titre du crédit d’impôt pour la RS et DE.
Appel à l’action
Comme nous l’avons mentionné plus haut, même si l’ARC reconnaît que les recherches entreprises par les SMP peuvent satisfaire aux critères d’admissibilité au programme de RS et DE, il a toujours été difficile de déterminer l’admissibilité au crédit d’impôt en raison de la relation entre la SMP qui effectue les recherches et les autres entités affiliées. Ainsi, l’ARC refusera parfois les crédits d’impôt en raison du contrat entre le médecin et une entité affiliée, en faisant valoir par défaut que les recherches sont effectuées par un médecin praticien pour le compte de l’entité affiliée et non de la SMP.
Andre Lamy MPC c. La Reine
Une décision récente de la Cour canadienne de l’impôt (Andre Lamy Medicine Professional Corporation c. La Reine, 2020 CCI 61) clarifie la possibilité pour une SMP de se prévaloir des encouragements fiscaux pour la RS et DE. Durant les années d’imposition visées (2013 et 2014), le Dr Lamy était chirurgien cardiaque et chercheur à l’hôpital général de Hamilton et se livrait à des activités afférentes et accessoires à l’exercice de la médecine au nom de la SMP. Le Dr Lamy a également enseigné à l’Université McMaster où sa charge d’enseignement comprenait des cours sur la méthodologie de la recherche et l’inclusion d’étudiants en chirurgie cardiaque. Il n’était pas un employé de l’hôpital. Il exerçait ses fonctions en tant que chirurgien cardiaque et menait ses recherches en tant qu’employé de la SMP. Ainsi, la SMP, et aucune autre entité, lui versait un salaire pour le temps consacré à ses recherches. Elle a donc déduit les dépenses de main-d’œuvre en lien avec les recherches admissibles en RS et DE pour ces années d’imposition.
Durant les procédures judiciaires, la question principale était de déterminer si la SMP effectuait les travaux en RS et DE ou si le Dr Lamy les effectuait en son nom propre à titre d’employé d’une entité de soins de santé affiliée (en tant que professeur à l’Université McMaster). Après un examen des faits et du témoignage du Dr Lamy selon lequel il effectuait le travail en tant qu’employé de la société Andre Lamy MPC, la Cour a jugé que, puisque le Dr Lamy était l’unique employé de l’appelante, il était le seul en mesure d’effectuer les recherches en question. De plus, le contrat de travail du Dr Lamy précise qu’il ne doit pas consacrer de temps à quelque activité que ce soit autre que pour le compte de la SMP. Même si les Instituts de recherche en santé du Canada ont accordé une subvention pour le projet Coronary, aucun paiement n’a été versé en vertu de l’accord sur ce projet au Dr Lamy ou à sa SMP. Le salaire du Dr Lamy pour ces recherches était versé directement par la SMP. La Cour a également tenu compte du fait que, même si le Dr Lamy avait signé les contrats de recherche de son propre nom, cela n’entrait pas en contradiction avec son témoignage qu’il les signait au nom de la SMP, puisqu’il procédait de la même façon pour la facturation de ses services médicaux. La Cour a admis la thèse du Dr Lamy selon laquelle il effectuait les travaux de recherche à titre d’employé de la SMP et, par conséquent, elle a statué que la SMP a droit aux crédits d’impôt pour la RS et DE.
La décision de la Cour est une bonne nouvelle puisqu’elle permet de clarifier l’admissibilité au crédit d’impôt pour la RS et DE des SMP affiliées à des entités de soins de santé. Elle peut également inciter les médecins enseignants à se prévaloir du crédit d’impôt pour la RS et DE pour les dépenses connexes engagées par leur SMP.
Éléments à considérer
Si le médecin à titre d’employé de sa SMP, ou la SMP en tant que telle, effectue des travaux de RS et DE en collaboration avec une entité affiliée, veillez à ce que tout document contractuel associé soit établi au nom de l’entité d’affaires (la SMP) qui demandera le crédit d’impôt pour la RS et DE à titre d’exécutant des travaux, plutôt qu’au nom personnel du médecin. De plus, il y a lieu d’établir un contrat de travail en bonne et due forme entre la SMP et le médecin, dressant la liste des responsabilités, notamment les tâches cliniques, administratives, d’enseignement et de recherche. Comme pour les crédits d’impôt pour la RS et DE dans n’importe quel secteur d’activité, il est important de faire un suivi serré des travaux en RS et DE et des dépenses connexes. Cela comprend les détails de la planification, des expériences, de la collecte de données, de l’analyse de ces données et de la formulation de conclusions. Il est important également de faire un suivi des dépenses de main-d’œuvre connexes et des autres dépenses admissibles, par projet et par activité.
Comment MNP peut aider?
MNP a aidé des centaines de professionnels de la santé au Canada à obtenir le crédit d’impôt pour la RS et DE par l’intermédiaire de leur SMP. Le manque de clarté en lien avec les enjeux propres aux SMP a entraîné dans certains cas des vérifications détaillées et, même si les résultats ont été en faveur des SMP, ces démarches ont tout de même exigé beaucoup de temps et d’efforts. Les plus récentes indications de l’ARC laissent croire que la demande du crédit d’impôt pour la RS et DE par une SMP est complexe et qu’elle doit être établie par une équipe d’experts qui en comprend bien la complexité ainsi que les règles fiscales connexes.