Le divorce, ça peut être complexe – et c’est souvent coûteux. Il suppose notamment la séparation des biens entre les ex-époux et l’établissement, s’il y a lieu, d’une prestation alimentaire aux enfants ou à l’ex-époux.
Mais qui plus est, la séparation des biens d’un professionnel – par exemple un régime enregistré d’épargne-retraite (REER), un compte d’épargne libre d’impôt (CELI), une résidence principale ou les actions d’une société privée – soulève d’importants enjeux fiscaux.
REER et CELI
Le transfert entre époux de sommes cotisées à un REER, avant comme après le divorce, s’effectue sans incidence fiscale pourvu qu’il se fasse directement d’un compte REER à l’autre. Sinon, toute somme retirée sera imposable à titre de revenu dans l’année du retrait. Il est normalement possible de transférer entre époux des sommes cotisées à un REER à l’abri de l’impôt lorsque :
- les époux vivent séparément;
- le transfert s’inscrit dans le cadre d’une convention de séparation;
- il s’effectue en règlement de droits découlant de la fin d’un mariage ou d’une union de fait.
En règle générale, les sommes cotisées à un CELI peuvent également être transférées entre époux à la fin d’un mariage sans incidence sur les droits de cotisation respectifs de ceux-ci, pourvu encore une fois que le transfert s’effectue directement d’un compte CELI à l’autre (c.-à-d. sans retrait).
Biens immobiliers
La résidence familiale principale est souvent l’un des biens les plus précieux à gérer dans le cadre de la séparation de biens. Il importe donc que la convention de séparation traite de diverses questions fiscales entourant celle-ci, notamment celle de savoir qui peut réclamer l’exemption pour résidence principale si les époux sont propriétaires de plusieurs résidences au cours du mariage et après le divorce.
D’ordinaire, l’exemption pour résidence principale est utilisée pour aliéner la résidence principale sans incidence fiscale. Toutefois, elle ne peut être réclamée que par un seul des conjoints mariés ou unis de fait, pour chaque année du mariage ou de l’union. Ainsi, si un couple en cours de divorce est propriétaire de plusieurs résidences, le conjoint qui fait sa déclaration d’impôt et réclame l’exemption le premier empêchera l’autre d’en faire de même pour une autre résidence pour la même période. Étant donné l’avantage que représente la vente d’une résidence principale sans incidence fiscale, cela pourrait se traduire par un déséquilibre prononcé entre les conjoints.
Par ailleurs, si une résidence est transférée en franchise d’impôt (par roulement) à un ex-époux, celui-ci pourrait éventuellement réaliser un gain en capital qui n’est pas couvert par l’exemption pour résidence principale, gain qui pourra être attribué au cédant. Dans ce cas, l’« attribution » entraînerait une situation où l’un recevrait un produit de vente sur lequel l’autre serait imposé.
Il est possible de contourner ce problème en produisant un choix auprès de l’Agence du revenu du Canada (ARC) pour que la responsabilité fiscale ne soit pas attribuée à l’époux cédant. Autrement dit, ce sera l’époux bénéficiaire du produit de la vente qui sera imposé sur celui-ci.
Société professionnelle
Souvent, un professionnel conservera une part importante de son actif dans sa société professionnelle, où il peut accumuler des investissements passifs tels des titres négociés sur un marché. Hélas, cette valeur n’échappe pas à la séparation des biens en cas de divorce.
Idéalement, on sera en mesure de laisser au professionnel ses actions et la valeur de sa société professionnelle en attribuant à l’autre époux d’autres biens, ce qui évite d’entamer cette valeur, processus potentiellement complexe et coûteux.
Mais lorsqu’on ne peut y échapper, il y a plusieurs options à considérer :
Rachat d’actions
Si les deux ex-époux détiennent des actions participantes de la société professionnelle (et dans la mesure où les normes professionnelles provinciales applicables le permettent), l’option la plus simple est d’effectuer le rachat des actions détenues par le non-professionnel (autrement dit, faire en sorte que la société les rachète). Cependant, le rachat entraînera probablement l’émission d’un dividende réputé imposable à l’ex-actionnaire.
Achat d’actions
Autre possibilité : le professionnel achète les actions de son ex-conjoint. Cela peut être avantageux pour le vendeur s’il réclame l’exemption pour gains en capital, en ce que celle-ci peut réduire, voire éliminer l’impôt qui sera par ailleurs payable à la cession des actions.
Transaction papillon entre personnes liées
On appelle parfois la dernière option « transaction papillon entre personnes liées ». En règle générale, une telle opération sépare les biens appartenant à une société de sorte que certains d’entre eux soient transférés à une autre société appartenant à l’ex-époux avec report d’impôt. Chaque ex-conjoint se retrouve ensuite propriétaire de sa propre société, chacune desquelles ayant dorénavant ses propres biens.
Dans le cas d’un professionnel, une telle transaction pourrait s’effectuer en laissant à l’ex-conjoint professionnel la société où se trouvent les biens nécessaires à l’exercice de sa profession, et au non-professionnel, les actions de la société privée où se trouvent les autres biens, par exemple des actions cotées en bourse. Il est parfois possible d’effectuer une transaction papillon entre personnes liées même lorsque les époux n’étaient initialement pas tous deux actionnaires de la société privée. Toutefois, les règles fiscales entourant ce genre de transaction étant nombreuses et complexes, il est recommandé de retenir les services d’un fiscaliste.
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